vendredi 22 janvier 2010

La main dans la boîte : chapitre trois : Le Majordome

Comme dans chaque ville de province, il y avait une butte et sur cette butte, un manoir. Cette riche maison appartenait à l'homme le plus riche de la région qui avait fait fortune dans l'élevage de chats. Elle comprenait le manoir en lui-même, des écuries, un grand parc et un étang. Pourtant, monsieur Burgess ne profitait pas de cet environnement idyllique. Il préférait faire des parties de cache-cache avec Jacques, son majordome. Il l'avait à son service depuis plus de 20 ans et ne s'était toujours pas rendu compte que le français le détestait cordialement. A vrai dire, ce n'était pas de sa faute, Jacques avait une particularité physique qui ne jouait pas en sa faveur : il avait le visage complètement figé. Il était incapable de montrer la moindre émotion. Ce que monsieur prenait pour du flegme professionnel était en fait une erreur génétique. Oh et monsieur n'avait pas saisi non plus que Jacques était français.

Ce matin-là, il s'était encore caché dans le placard de sa chambre. Jacques avait donc décidé de préparer le déjeuner avant d'aller chercher le vieux croûton. Il coupait des poireaux en morceaux lorsque la sonnette retentit. Il alla ouvrir la porte. Flack et son officier se tenaient sur le seuil, tout sourire.

« On a retrouvé la main de Scarlett ce matin. Dans une jolie boîte.

-Je suis sûr qu'elle apprécierait l'attention. C'est une chose horrible.

-Vous ne semblez pas particulièrement ému.

-J'ai un problème avec les muscles de mon visage. Je ne peux pas les bouger.

-Ah. Euh. Donc. Vous avez eu des nouvelles d'elle dernièrement ?

-Non, mais monsieur n'a pas beaucoup de contact avec ses filles depuis qu'il a... Perdu l'esprit.

-Hum. Combien de filles a-t-il ?

-Trois. Scarlett et Blanche, des jumelles et Alice la petite dernière.

-Jumelles ?

-Fausses jumelles. Elles ne se ressemblent pas mais partagent des traits communs, comme leurs empreintes digitales.

-C'est intéressant. Elles font quoi dans la vie ?

-Scarlett élève des lapins, Blanche est éditrice et Alice, n'a pas d'emploi. C'est un esprit libre, vous savez.

-Où puis-je les trouver ?

-Blanche est facile à dénicher, Alice a disparu du radar depuis un bout de temps et Scarlett, hé bien je ne vais pas vous faire l'insulte de raisonner à votre place.

-C'est gentil à vous. Vous êtes plein d'esprit.

-Ce n'est pas parce que je suis l'homme invisible que je ne pense pas. »

La main dans la boîte : chapitre deux : L'Inspecteur

John Flack était d'une laideur repoussante. A l'âge de 12 ans, il avait eu le malheur d'attraper la petite vérole qui lui laissa de mauvaises cicatrices et à l'âge de 15 ans, l'acné acheva de façonner un visage plein de creux et de bosse qui n'avait rien de poétique. Son regard brillait à la fois par son intelligence et sa malice. Sans oublier un physique qui lui aurait permis de passer inaperçu s'il n'avait pas eu le visage que la nature lui avait abîmé. Il avait 20 ans d'expérience dans la police et le plus haut taux d'affaires résolues. On racontait dans son dos que les voyous avouaient tout de suite dès qu'ils le voyaient. Ils avaient nommé cela « l'effet Flack » avec un grand sens de l'originalité. Il était donc le plus qualifié pour pour s'occuper de l'affaire de la main.

Il commença par examiner l'objet de toutes les attentions. Il tourna autour de la main pendant cinq bonnes et longues minutes. Palmer était, pendant ce temps, au bord de l'agonie et Dexter, hé bien, il avait fort à faire avec son estomac. « Hum, dit l'inspecteur, quelle heure est-il ? ». La question était totalement déplacée. Palmer sentit monter en lui une vague d'indignation. Comment pouvait-il avoir des pensées aussi triviales en présence d'une telle beauté ? Quel mufle ! Un officier lui répondit, il semblait, lui aussi, être indifférent à la perfection de la main. « Il est 10h30, monsieur.

-Et merde, jura l'inspecteur, bon, on va devoir se débrouiller tout seul, messieurs. Il est trop tôt pour que notre légiste tire ses fesses hors de son lit. Alors on ouvre grand les yeux et on ne touche à rien sans que j'en donne l'autorisation. »

Il se tourna ensuite vers Palmer qui tremblait de rage dans son coin.

« Vous, l'interpella-t-il, vous êtes bien le croque-mort ?

-Ce n'est pas évident ?

-Hey, pas de sarcasmes, jeune homme, coupa-t-il, bon, vous ferez l'affaire. Dites-moi depuis quand elle est en dehors de son milieu naturel.

-D'après l'état des chairs, je dirais deux ou trois jours. Et le sujet était en vie quand on lui a coupé la main.

-Vous voyez autre chose ?

-Elle présente des callosités sur les doigts. Cette femme devait avoir un métier manuel.

-Cette femme ?

-Oui, c'est évident que c'est la main d'un femme, non ?

-Bon, elle fait un métier manuel. Elle pourrait travailler dans la sculpture, par exemple ?

-Oui, mais elle aurait les mains plus abîmées que ça.

-Oh non...

-Quoi ?

-Elle pourrait travailler dans l'agriculture, l'élevage de lapins ? Ce serait possible ?

-Ça, oui, ce serait plus plausible.

-Je sais à qui appartient cette main, merci Palmer. »

Flack faisait les cents pas dans son bureau. Il gesticulait dans tous les sens, signe d'une galère à venir pour son officier. Il poussa tout de même la porte du bureau et demanda ce qui se passait.

« Une tuile énorme, voilà ce qui se passe. Les résultats des tests ADN viennent de tomber et la main appartient bien à Scarlett Burgess. La Scarlett Burgess.

-La fille de monsieur Burgess ?

-T'es une vraie lumière dis-moi. Oui, le monsieur Burgess du manoir Burgess. Va falloir aller interroger le majordome.

-On ne peut pas parler à monsieur Burgess directement ?

-Tu rigoles ! Il ne se laisserait interroger que par Dieu tout puissant en personne. Et contrairement à ce que tu penses, ce n'est pas moi. Alors le majordome, c'est tout ce à quoi j'ai droit. Je sais c'est triste. »

Problème métaphysico-scribouillard

Dans n'importe quelle nouvelle ou n'importe quel truc que l'on écrit et que l'on veut un peu soigner, se pose le problème des versions. Il est très rare, et pardon de démolir un mythe rendu incontournable par le cinéma ou les séries, qu'un écrivain ponde le roman de sa vie en une fois, comme ça, sans rature ou recours frénétique à la touche effacer. Il suffit de voir l'expo virtuelle de la BNF sur ce thème précis.
Pour mon modeste cas, La Main dans la boîte, première histoire close de l'année 2010, en est à sa sixième version, celle que je publie étant la version deux ou trois. Je vais donc l'enlever pour proposer la toute dernière version, qui élague beaucoup mais se tient en somme.

EDIT : Quelques noms changent : Scarlett Burgess remplace Meredith Faulkner dans le rôle de la fille mystérieuse à la main coupée.

De toute façon, cette 5 ème version déchire par rapport aux autres donc je ne culpabilise pas. Pas le moins du monde. Pardon à toi ma ptite Lem qui a religieusement lu les trois premiers posts.

mercredi 13 janvier 2010

Putain, 10 ans !

L'IMDB (Internet Movie Data Base) , présentée comme la bible du cinéma sur internet, a donné son top 25 des films de la décennie (ben oui on est en 2010) et je dois dire que je suis franchement complètement d'accord avec lui. Nolan, Christopher de son petit nom, est bien le réal de la décennie avec les meilleurs films que j'aie jamais vu. Il manquerait Insomnia, mais le film est moins bon que les autres, j'ai peiné à trouver la patte de monsieur dans tout ce fouillis Al Pacino - Robin Williams. Et que dire, que dire des différentes performances d'un autre de mes dieux personnels (je mens pas il est Arès dans un nouveau projet que j'ai en préparation), Christian Bale, qui fait juste le film à chaque fois qu'il joue. Il est là aussi dans 3 des films de Nolan. A noter, The Dark Knight est aussi le film de la décennie selon le site Flickchart (classement non professionnel).
Sinon, les autres sont pas mal aussi.

25 - Batman Begins
24 - District 9
23 - Sin City
22 - Gran Torino
21 - La Chute
20 - Slumdog Millionaire
19 - Le Prestige
18 - Le Labyrinthe de Pan
17 - Là-Haut
16 - Inglourious Basterds
15 - Requiem for a Dream
14 - Eternal Sunshine of the Spotless Mind
13 - La Vie des Autres
12 - Le Voyage de Chihiro
11 - Le Pianiste
10 - Les Infiltrés
9 - Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain
8 - Wall- E
7 - Le Seigneur des Anneaux - les Deux Tours
6 - Memento
5 - Avatar
4 - Le Seigneur des Anneaux - La Communauté de l'Anneau
3 - La Cité de Dieu
2 - Le Seigneur des Anneaux - Le Retour du Roi
1 -
The Dark Knight - Le Chevalier Noir

vendredi 8 janvier 2010

Nouveau blog : Pourquoi ? Comment ? De quoi tu causes ?

Hé bien, je m'étais dis que : non, je n'ai pas le temps de faire un blog cette année, je coupais donc les hyperlien (vanne de geek, on est prié de rire ou au moins de sourire) et flûte. Mais voilà, on ne peut pas chasser la blogueuse indéfiniment. Me revoilà donc sur la toile avec un nouveau bébé. Je vais donc essayer de ne pas me disperser et de poster à la fois mes humeurs et mes débuts de nouvelles (je ne sais pas où je posterai l'intégralité des textes) sur un blog unique.

2010 donc. Le début d'année étant un passage obligé pour les nouvelles résolutions (bonjour l'originalité mais moi, j'y mets mon grain de sel et de tarétude), je m'exécute.


  • Regarder des Hitchcock : en partie commencé grâce à la dvdthèque de ma génialissime BU d'angers.
  • Et dans la même catégorie : me faire une vraie culture ciné, du genre à pouvoir coller les gens au jeu du "c'est un film australien et à un moment, heath ledger parle au mec de melrose place, indice supplémentaire : il est brun dans ce film."
  • Lire autre chose que Lovecraft et Stephen King et me mettre au Comics : déjà Sandman et Watchmen au compteur, on ne se relâche pas
  • Poster des nouvelles à un rythme régulier et pas laisser les pauvres lecteurs en plein suspense : je ne garantis rien
  • Me montrer plus gentille avec les Sons Of Anarchy : j'ai pas été aimable au début mais ça a fini par décoller vers quelque chose de plutôt pas mal.
  • Râler moins : mouahhahahhahah, allez on arrête de rigoler.
Here we go les enfants ! Pourvu que ça marche !

mardi 5 janvier 2010

L'affaire de la main

Chapitre un : Le Croque-mort

David Palmer était croque-mort. Il portait toujours le même costume sombre qui mettait en valeur sa silhouette rachitique. Il n'était pas beau, ni même charmant. Son métier lui avait forgé un visage abrupt, osseux et légèrement inquiétant. C'était un vrai professionnel et les familles qui faisaient appel à lui ne le regrettaient jamais bien qu'il leur laisse le même souvenir un tantinet effrayant. En ce jour-là, il posait son regard de poisson mort sur la famille Baxter. Ils venaient de perdre leur grand-père et sanglotaient sur les cercueils en exposition. Comme pour chaque famille en deuil, ce qu'ils disaient étaient hachuré et inarticulé, mais David était passé maître dans l'art du langage de sangloteur et le comprenait donc aisément. Madame finit par se décider pour un modèle en chêne clair (il aimait tellement le bois) aux poignées d'or (une dernière pensée pour cet avare impénitent). David le nota et raccompagna les sangloteurs jusqu'à la sortie, les yeux embués n'aidant pas à la vision correcte du monde alentour. Une fois la commande enregistrée, il alla dans le laboratoire où dormait – oh pardon – travaillait son assistant Dexter.



Dexter Sonic, en plus de son nom étrange, avait un physique d'enfant de cœur. Le visage rond et poupin, les yeux rieurs et de belles boucles d'un blond roux lui donnaient un air adorable exaspérant. Sans oublier sa corpulence digne d'un volleyeur professionnel, mince, nerveuse qui combinée au reste, le rendaient si beau, si attirant qu'on avait envie de le tuer dès qu'on posait les yeux sur lui. Une chance pour lui, David accordait aux apparences la même importance qu'à une bande d'enfants rieurs et braillards, c'est-à-dire, aucune. Le seul petit souci qu'il avait avec lui, était sa fâcheuse tendance à s'endormir partout. Encore cette fois-ci, il le trouva assoupi sur une table de traitement. Deux ou trois raclement de gorge plus tard, Dexter tomba sur le sol avec un bruit mou.



« Encore une nuit difficile, patron, expliqua-t-il, je me suis fait poursuivre par de gros chiens ou des enfants poilus, j'ai pas bien vu. J'ai couru toute la nuit avant de me rappeler que je pouvais me cacher ici. J'ai une petite tête. »



David leva un sourcil, puis décida de ne pas lui en tenir rigueur. Les idiots ne peuvent pas se rendre compte de leur état. « De nouveaux sujets vont arriver, occupe-t-en. ». Il n'avait rien contre lui, mais il n'aimait pas rester trop longtemps dans ses parages. Toute cette bonne humeur, cette joie de vivre et cet enthousiasme, il avait peur de se faire contaminer. Il ne manquerait plus que ça, un croque-mort heureux. Quelle indécence ! David portait fièrement son allure dépressive comme un étendard.



Lorsqu'il revint à l'accueil, il découvrit que quelqu'un avait déposé un cadeau sur le comptoir : un beau cadeau crème avec un ruban rouge vif. David trouva l'objet tout à fait encombrant et terriblement inapproprié. Il se dépêcha de l'ôter de la vision des clients potentiels et alla le cacher dans le laboratoire. Pour une fois, Dexter fit une réflexion intelligente en voyant son patron essayer de planquer le paquet dans une armoire. « Vous n'allez pas l'ouvrir ? ». Interloqué, David resta figé dans son mouvement. Dexter s'approcha et saisissant un scalpel, coupa le ruban. Une carte tomba par terre. Dexter la prit et lu le message qui signait le cadeau. « Ceci est un cadeau pour vous. Je sais que vous saurez en apprécier la beauté. ». Le petit mot n'avait pas d'auteur. « J'espère que ça ne va pas devenir une habitude, c'est extrêmement gênant. ». David dissimulait mal son dégoût. Dexter, excité comme une puce, enleva le couvercle de la boîte, et - oh surprise – trouva une main.



C'était une belle main, une main de femme dont la peau semblait douce comme de la soie. La personne qui l'avait perdue devait avoir une jolie carnation de rousse. La peau était pâle et les veines légèrement bleutées. C'était une main parfaite. La seule chose qui semblait étrange venait du fait qu'elle était détachée de son corps d'origine. Alors que Dexter montrait des signes inquiétants de remontées de bile, David était pour ainsi dire fasciné. « Il faut appeler la police, burp, le FBI, burp, la garde nationale... ». Dexter conclut son énumération avec un son particulièrement disgracieux, mais David ne l'entendait pas. Il n'avait d'yeux que pour cette main.



Il resta avec elle jusqu'à l'arrivée de l'inspecteur John Flack. ( à suivre : L'inspecteur)